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ROBOTS D'ALIMENTATION : UN IMPACT ZOOTECHNIQUE LIMITÉ

Valmetal Le constructeur québécois propose différents automates : un wagon mélangeur sur rail, ou une mélangeuse en poste fixe associée soit à un wagon sur rail, soit à un convoyeur à bande transporteuse (tapis roulant). Dans le cas de constructions neuves, ce dernier permet de réduire la largeur du bâtiment.© D.G.

UN ESSAI RÉALISÉ EN SUISSE SUR L'AUTOMATISATION DE LA DISTRIBUTION DE LA RATION CONFIRME LES RÉSULTATS OBSERVÉS EN FRANCE : MULTIPLIER LE NOMBRE DE REPAS VIA LE ROBOT D'ALIMENTATION A PEU D'EFFETS SUR LES PERFORMANCES.

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L'AMÉLIORATION DE L'EFFICACITÉ ALIMENTAIRE via la multiplication des repas est un argument commercial en faveur des systèmes d'automatisation de distribution de la ration. Les éleveurs équipés d'automates suivent, en moyenne, un rythme de 7,6 distributions par jour. Or, une étude suisse vient confirmer les premières conclusions émises par l'Institut de l'élevage et Arvalis-Institut du végétal, à l'issue d'une étude réalisée début 2013 à la ferme expérimentale de la Jaillière, en Loire-Atlantique, (voir L'Éleveur laitier n° 222) : la distribution des repas jusqu'à douze fois par jour a un effet limité sur l'ingestion et sur la production laitière. En outre, la réduction du temps de travail permise par le robot d'alimentation permet difficilement d'amortir le surcoût lié au montant de l'investissement.

DE UNE À HUIT DISTRIBUTIONS PAR JOUR

La ferme expérimentale de la Jaillière est équipée du système Rovibec. À partir de cet équipement, trois lots de 17 vaches, avec trois rythmes différents de distribution de la ration, ont été comparés : le lot 1 était nourri sur le principe d'une distribution par jour, avec deux repousses manuelles ; le lot 2 recevait trois distributions par jour à 7 h 00, 12 h 00 et 18 h 00 ; le lot 3, huit distributions par jour programmées entre 4 h 00 et 18 h 30. Dans les trois cas, il s'agissait d'une ration complète, à volonté, avec une place de cornadis par animal pour limiter les phénomènes de compétition. C'est dans ces conditions que les critères zootechniques ont été mesurés (lait, TB, TP, ingestion, poids vif) ainsi que les critères comportementaux (temps d'activité, consommation, rumination, repos). Résultats : des niveaux d'ingestion équivalents (19,3 kg de MSI pour le lot 1, 19,1 kg pour le lot 2 et 19,8 pour le lot 3) ; une proportion de refus légèrement supérieure pour le lot 3 (9,1 % contre 7,7 % et 7,2 % dans les lots 1 et 2) ; des différences de production de lait standard non significatives (25,4 l pour le lot 1 et 24,7 l pour les lots 2 et 3).

VERS UNE AUGMENTATION DE L'INGESTION ET DE LA PRODUCTION

« En conditions optimales d'alimentation, on constate qu'il n'y a pas d'effet significatif sur la production et le comportement. Les temps de couchage, d'ingestion et de rumination sont équivalents », explique Jean-Luc Ménard, chargé d'étude à l'Institut de l'élevage.

Plus précis, le travail mené en Suisse s'appuie sur deux années d'essais réalisés dans le cadre de la thèse d'Anne Grothmann. L'objectif de cette expérimentation était aussi de mesurer les effets directs de l'augmentation de la fréquence de distribution sur l'ingestion, la production laitière et le comportement des vaches laitières. Les essais ont été réalisés à la ferme expérimentale de Tänikon (66 vaches), enrichis par l'observation de six exploitations laitières allemandes.

LE COÛT DE DISTRIBUTION DE LA RATION MULTIPLIÉ PAR TROIS

Deux protocoles ont été observés : le premier a mis en parallèle les résultats zootechniques issus de deux distributions par jour, comparés à six et huit distributions par jour. Le second, une distribution par jour comparée à dix et douze distributions. Les chercheurs ont par ailleurs observé l'évolution des ensilages stockés en trémie pendant plusieurs jours, avec un équipement de marque Pellon : cinq trémies à fourrages et une mélangeuse mobile sur rails.

Quel que soit le protocole, aucune différence significative n'est apparue au niveau du comportement alimentaire des animaux (temps de rumination, d'ingestion et de repos). L'ingestion de matière sèche et la production laitière ont eu tendance à augmenter avec le nombre de repas (voir tableau). Mais là encore, pas de façon significative d'un point de vue statistique. Enfin, le contrôle de la stabilité du fourrage en chambre de préstockage confirme que le risque d'échauffement, et donc de perte de la valeur nutritive, est plus important en été et ne doit pas dépasser 48 heures. À ce titre, l'utilisation d'une désileuse cube limite les risques.

En complément de l'étude comparative des performances zootechniques, le travail réalisé à la Jaillière a également permis de mesurer le gain de temps et l'impact financier de la robotisation : un investissement de 150 000 à 260 000 € selon le modèle et les aménagements à réaliser dans le bâtiment existant. Compte tenu de ces montants, dans un élevage de 100 à 160 vaches, l'équipement s'amortit sur dix ans à 4 % pour un coût évalué entre 25 et 35 €/1 000 l. « Le coût varie selon les modèles mais aussi selon la complexité de la ration, l'utilisation d'outils spécifiques pour les fourrages secs, le nombre de distributions par jour, d'animaux ou de lots... », souligne Jean-Luc Ménard. Le chercheur rappelle que l'objectif dans un système de distribution classique est de 5 à 6 €/1 000 l et qu'en la matière, les matériels les plus chers génèrent un coût de mécanisation compris entre 10 et 20 €/1 000 l. Cependant, l'intérêt de ces équipements réside aussi dans l'allégement du temps de travail dédié à l'alimentation (19 % du travail d'astreinte). À la Jaillière, la distribution automatique représente en moyenne trente minutes d'astreinte quotidienne : approvisionnement des trémies, réglage selon l'évolution de la taille des lots, modification de la ration, surveillance... et six minutes pour le nettoyage de la table d'alimentation.

BÂTIMENT : RÉDUCTION DES SURFACES ET DU COÛT

« Pour un troupeau de 100 VL, le gain est évalué à 1,6 h/j, comparé à une distribution avec la mélangeuse. En situation de zéro pâturage, cela représente 500 et 600 h/an, soit pour une rémunération de 15€/h, une économie de 7 500 à 9 000 €/an. Sur le terrain, selon le degré d'équipement précédent et la taille du troupeau, le gain oscille entre 0,5 et 3 h/j, ce qui ne permet de compenser que 50 % du surcoût de mécanisation lié à l'investissement. »

Les constructeurs mettent également dans la balance les gains de place en bâtiment. Car l'automatisation permet de concevoir des couloirs d'alimentation d'une largeur de 2,50 m, voire 1,80 m pour les tapis d'affouragement, qu'il faut comparer aux 4 m nécessaires à l'attelage du tracteur et de la mélangeuse. « Cette source d'économie n'est pas systématique. Car l'utilisation de matériel suspendu réclame des surfaces portantes adaptées. Mais il reste cependant des éléments non chiffrables à prendre en compte, comme la valorisation du temps de travail économisé pour améliorer le suivi du troupeau, l'analyse des performances en conditions d'alimentation plus restrictives, ou encore la baisse du coût énergétique induite, comparée à l'augmentation du coût de maintenance », explique Jean-Luc Ménard

JÉRÔME PEZON

Bélair Sur le modèle d'un chariot lève-palette, à conduite manuelle ou automatique, le robot d'alimentation Aviso assure le mélange et la distribution de la ration à l'auge. La présence d'une fraise frontale permet d'automatiser le désilage et de prendre en charge la distribution de façon entièrement autonome. Cet automate sera commercialisé en fin d'année 2015.

Rovibec La ferme de la Jaillière est équipée du dispositif Rovibec : dans la cuisine, des convoyeurs à fond mouvant chargent la mélangeuse en poste fixe qui approvisionne un wagon distributeur sur rail. Une option associant wagon mélangeur et silo tour permet d'automatiser le chargement.

© CEDRIC FAIMALI/GF

Pellon La ferme de Tänikon est équipée du dispositif Pellon : dans la cuisine, cinq trémies approvisionnent la mélangeuse mobile suspendue sur rail.

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